18 Mai  2015

David est pensif dans son bureau. Il se réjouit du nombre de personnes se portant volontaires dans la contribution aux 7 chantiers du projet « Vision Bleue » bâti lors d’un séminaire de direction en décembre dernier. Les 6 pilotes de projet n’ont strictement aucun problème pour « recruter » des contributeurs, mais c’est visiblement plus dur pour  Anne Sophie  sur un de ses 2 chantiers, celui portant sur l’implication des salariés, le fameux EE (Employee Empowerment) , qui suscite une certaine méfiance. 

Et en cette fin de matinée, David a l’occasion de se questionner sur ses talents de télépathe, car au moment même ou il pense à cela, voilà Anne Sophie, la crinière au vent, qui déboule dans son bureau pour lui parler du sujet même sur lequel sa pensée s’égarait à l’instant.

(Anne Sophie) David, je suis hors de moi ! Je viens de relancer un appel à candidature pour la nième fois sur la participation au groupe de travail sur l’EE, et personne ne se déclare ! C’est dingue ! C’est quoi leur problème ? Ils veulent rester de bons soldats parce qu’ils ont la trouille d’être en première ligne ? Ils ont peur de se faire buter ? C’est à n’y rien comprendre, ce chantier est tellement important ! C’est une occasion formidable pour faire bouger les lignes, faire des propositions pour agir avec plus de latitude, et eux, à travers leur silence, ils me disent qu’ils veulent garder leurs chaines quitte à se faire bouffer par les lions. Quel bande d’obscurantistes !  

(David) C’est génial que tu te révoltes, je crois que tu n’aurais pas du tout réagi comme ça il y a quelques mois, tu aurais plutôt pris cet évènement comme la confirmation que le changement est une utopie. Mais dis moi, qu’est ce que tu te dis d’autre à propos de ça ?

(Anne Sophie) Je me dis que je leur fous la trouille, parce que je suis MADAME De La Margeride, et que MADAME De La Margeride est en train de les rouler dans la farine pour mieux les planter après ! Mais qu’est-ce que je fais pour avoir si peu de légitimité ?? Quand je vois comment ils obéissent à MOSSIEUR Edouard  sans sourciller, même quand il est à l’ouest, ça me révulse ! Edouard, c’est Moise, ils pourraient le suivre pendant des décennies pour aller en terre promise.

(David) Non, c’est YAVE

(Anne Sophie) Quoi ?

(David) Non, rien, c’est juste une boutade. Rappelle moi ton profil Process Com’ ?

(Anne Sophie) Oui bon, tu le connais, tu sais tés bien que c’est Rebelle, base et phase

(David) Et donc ?

(Anne Sophie) Et donc cela veut dire que ma problématique psychologique est « suis-je acceptable pour les autres », ça va j’ai appris ma leçon !

(David) Et donc ?

(Anne Sophie) ben quoi, euh, je sais pas …

(David) Je vais te proposer de lire un petit livret qui ne te prendra pas plus d’une heure de lecture ; il s’appelle « Les Accord Toltèques », il parle de 5 principes de vie, et un d’entre eux te propose  de ne pas faire une affaire personnelle de toutes les choses qui t’arrivent dans la vie

(Anne Sophie) … je te vois venir, j’ai lu le bouquin

(David) Et alors ?

(Anne Sophie) et alors il faut que je comprenne les raisons de leurs réactions plutôt que de me révolter et de blâmer parce que je ne me sens pas acceptée

(David) … d’autant que, en bonne Rebelle , ton comportement sous stress est ?

(Anne Sophie) de blâmer !

(David) Tu es très forte ! Tu réfléchis à 100km/h, j’adore !

(Anne Sophie) Mais alors pourquoi ? Pourquoi ne viennent-ils pas avec moi si ça n’a rien à voir avec moi ?

(David) Je vois plusieurs raisons possibles, toutes liées à UNE chose : vous êtes en train de changer vos valeurs profondes, Anne Sophie. Je ne parle pas de vos valeurs de surface, celles que vous affichez, ni même de vos valeurs cachées, votre « étiquette » que vous masquez et qui est implicite aux yeux des anciens, mais de vos valeurs profondes. Et tu sais que j’utilise la Spirale Dynamique pour vous éclairer sur ce sujet. Votre système de valeur actuel est très ancré DQ Bleu. Je vais te le rappeler, ce système, et n’auras pas besoin de moi pour ensuite, comprendre ce qui se joue, d’accord ?

(Anne Sophie) Mmmh, j’achète.

(David) Donc, le système DQ Bleu, c’est celui ou il existe une vérité ultime, qui est celle dictée par le chef, le modèle, le gourou, le pape, le fuhrer, le petit père des peuples, appelle-le comme tu veux. C’est qui, chez vous ?

(Anne Sophie) Edouard

(David) Oui, Edouard, mais plus généralement la famille dont tu fais partie. C’est la famille qui a amené votre entreprise là ou elle en est aujourd’hui. C’est elle qui a pris toutes les décisions fondatrices ou de rupture qui ont jalonné votre histoire. Et dans le système DQ BLEU, les valeurs profondes tournent autour du sacrifice de soi pour suivre le collectif, dirigé par un chef, qui détient la vérité ultime ; ces valeurs sont la morale, la loyauté, le respect de la hiérarchie et de l’ordre. Il peut s’agir d’un régime dictatorial, ou d’une religion, ou d’une institution hiérarchisée véhiculant de belles valeurs humaines … ou pas.  Dans ce système de valeurs, les membres sont convaincus qu’ils doivent obéir, et s’ils ne le font pas, ils ressentent une forme de culpabilité, et peuvent être stigmatisés voire exclus, comme Spinoza a pu le vivre il y a bien longtemps auprès de sa communauté religieuse. Les décisions ne sont pas forcément rationnelles, mais chacun vise à ne pas les questionner, partant du principe que c’est le chef qui détient la vérité ultime, que l’on comprenne ou pas, et que l’on soit d’accord ou pas.

(Anne Sophie) Ok, mais je suis de la famille, donc ils devraient me suivre ?  

(David) Eh bien le problème est que vous leur lancez une injonction paradoxale : d’un côté, tu as raison, vous leur dites ce qu’il faut faire et ils devraient vous suivre, mais de l’autre, et plus particulièrement sur ton chantier d’EE (implication des salariés) vous leur demandez de renier le système DQ BLEU et de faire du ER ORANGE. 

(Anne Sophie) Tu peux me rappeler, ER ORANGE, grosses mailles ?

(David) ER ORANGE, grosse maille, c’est qu’il n’y a pas de vérité ultime et que les choses, et notamment les décisions, doivent se prendre rationnellement. Chacun est redevable d’objectifs mesurables à atteindre, et aura une récompense individuelle s’il atteint ses objectifs, qui pourra être, notamment une évolution au mérite, même s’il n’a pas x années d’ancienneté dans l’organisation. Les valeurs profondes changent fondamentalement dans ce système : on va parler de réussite individuelle, de mérite, d’autonomie, d’innovation, de recherche continue de rationalité. On va beaucoup plus parler de progrès, d’amélioration continue. On prend plus de risque parce que l’on est plus optimiste sur l’avenir, là ou, en DQ Bleu, le chef avait un rôle de garant du Bien, protecteur vis-à-vis du Mal. C’est un système plus « démocratique » ou les objectifs sont plus négociés et contractualisés, mais ou l’on attend plus de chacun, en terme d’initiative, d’autonomie, et de performance puisqu’elle est désormais mesurée et pilotée de façon plus objective mais plus exigeante. Et vu que le progrès et la performance sont au cœur de ce système, il implique de beaucoup plus travailler en mode projet ou en transversal, ce qui met à mal les baronnies. C’est beaucoup plus difficile, dans ce système, d’appuyer son action sur sa seule position hiérarchique, même si elle reste la source de pouvoir principale.

(Anne Sophie) Mais c’est très bien, tout ça ! Je kiffe ! C’est ce dont on a besoin !

(David) Je suis content que tu sautes de joie mais les salariés sont pris dans cette injonction paradoxale, je te rappelle. En gros, c’est comme si vous leur disiez « clouez nous au pilori, nous nous sommes comportés comme des rois en dirigeant la maison de façon irrationnelle ». Tu comprends que c’est dur pour eux de croire que vous allez lâcher un peu de votre autorité ? Ils peuvent prendre vos promesses de management participatif comme de la démocratie de façade, car ils n’ont jamais entendu ce discours chez les De La Margeride.

(Anne Sophie) Oui, certes

(David) Et en plus vous leur dites implicitement « nous allons faire plus de pédagogie sur nos décisions, plus négocier avec vous parfois, et vous donner plus d’autonomie, mais attention, vous aurez plus de comptes à rendre ».  Peut-être certains se posent aussi la question de ce qu’ils ont à gagner à faire ça, tu comprends ? L’autonomie et les défis, ça peut faire peur à certains. Ils peuvent avoir peur de ne pas être à la hauteur, et sentir à travers ce changement une sorte de piège.   

(Anne Sophie) Ok, mais alors pourquoi les Génération Y ne viennent pas avec moi, eux devraient être appâtés par cette vision, non ?

(David) C’est une bonne question, je n’ai pas de réponse certaine.  Déjà, attention aux analyses inter générationnelles, chacun garde son individualité. Peut-être devrions nous revoir le contenu de notre Pitch au moment ou nous avons lancé le projet : nous l’avons construit ensemble, et peut être était- t- il trop anxiogène ? Peut-être les anciens ont répandu de fausses idées sur nos intentions sur ce chantier en particulier ?

(Anne Sophie) Qu’est-ce qu’on fait ?

(David) Tu te rappelles qu’Hubert nous a alerté sur le danger de mener tous les projets de front ? Nous avions alors décidé de lancer pour test tous les cadrages de projets en même temps, mais finalement, peut-être avait-il raison …. , et seul les idiots ne changent pas d’avis tu ne crois pas ?

(Anne Sophie) Tu parles de suspendre le projet ?

(David) Il me semble que le collectif nous dit, à travers ce peu d’enthousiasme, qu’il n’est pas mûr pour avancer sur cette question, là, maintenant. Cela te poserait un problème de le mettre en suspens ?

(Anne Sophie) Il faudra en parler en CODIR, mais vu le taf que vais me palucher sur l’autre chantier que je pilote, celui sur le référentiel de valeurs, sans compter l’intégration de ma nouvelle DAF et de mon nouveau DSI, je pense que ce serait une sage décision, comme dit mon frère Edouard.

 

L’éclairage de la spirale dynamique

Cet épisode nous donne sa série de bonnes nouvelles !

Anne Sophie a évolué, … avec son style bien particulier, certes !  Tout d’abord, elle valorise le chantier d’implication des salariés, typiquement de type ER Orange, et qui pourrait faire peur à une personne très ancrée en DQ Bleu (risque de sentiment de perte de contrôle). Ensuite, elle se lasse de cette distance hiérarchique qui fait que les employés n’osent pas prendre d’initiative. Egalement, elle « kiffe » la description ER Orange de David. Ensuite, elle s’intéresse à ses propres fonctionnements, à travers la lecture des accords toltèques et sa formation Process Com, autant d’opportunités pour développer son bien-être. On pourrait se dire que cela est téléguidé par David et Edouard, mais elle semble apprendre beaucoup sur elle-même à travers cela ( … même si elle a encore du chemin à faire sur les Accords Toltèques !) .

Quant à David, que nous avions laissé dans le premier épisode avec le sentiment d’une belle démonstration ER Orange, il nous confirme qu’il a d’autres cordes à son arc.

  • Un peu de FS Vert quand il la questionne en mode coaching, avec des messages de soutien qui partent d’une attitude empathique
  • Une analyse systémique de la situation, en conclusion, très GT Jaune, là ou en pur ER Orange, il continuerait à « foncer dans le tas » tant que la colère du terrain ne serait pas plus démonstrative

A vous !

Avez-vous lu ce magnifique manuel de savoir-vivre qu’est « Les Accords Toltèques ? » . Et si oui, à qui pourriez vous en parler dans votre entourage pour répandre de meilleures vibrations ?

Et vous, avez-vous parfois le sentiment d’être jugé personnellement quand les gens s’opposent à vous ? Ciblez une situation particulière ou cela peut être le càs. Puis je vous propose de vous poser les 4 questions de Byron KATIE

  1. Est-ce que le fait que je sois jugé personnellement est vrai ? 
  2. Pouvez-vous être absolument certain que ce soit vrai ?
  3. Que se passe-t-il en vous, comment réagissez-vous quand vous croyez cette pensée ?
  4. Que seriez-vous sans cette pensée ?